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Actualité et société
20 janvier 2016

Allain Bougrain Dubourg : le combat d’une vie

Fervent défenseur de l’environnement et du monde animal, Allain Bougrain Dubourg publie ses mémoires, Il faut continuer de marcher, aux éditions de la Martinière. Rencontre avec un journaliste engagé qui a consacré sa vie à la protection de la biodiversité…

 « C’est quoi ça ? C’est du phoque ? » plaisante Allain Bougrain Dubourg en apercevant ma capuche bordée d’un col en fourrure (synthétique bien sûr). On pourrait le croire épuisé et résigné après tant d’années de combat… Mais non. Bien au contraire, Allain Bougrain Dubourg n’a rien perdu ni de son humour, ni de ses espoirs. Et le titre même de ses mémoires, Il faut continuer de marcher, le prouve. Son rêve demeure toujours le même : celui d’une « grande réconciliation » entre l’homme et l’animal.

11h30. La porte des studios de Nature Productions, où Allain Bougrain Dubourg travaille quotidiennement à la protection de la biodiversité, s’ouvre. Partout, des magazines animaliers. Ici et là, quelques dessins de reptiles et des posters d’autres animaux. Aucun doute : il s’agit de la bonne adresse. Quelques minutes plus tard, il vient se présenter. Vêtu d’un jean et d’un pull simple, il donne l’impression d’un homme avenant et sympathique. Très énergique, il sait que son combat n’attend pas. Mais ce qui est le plus frappant demeure la douceur de son visage qui n’exprime aucune aigreur, aucune agressivité… Juste une remarquable gentillesse.

Quelques minutes d’entretien suffisent pour comprendre à quel point Allain Bougrain Dubourg est passionné. Passionné par les animaux, par l’écologie… par le monde qui l’entoure. Des paysages orangés et désertiques du Kenya à la blancheur infinie de l’Antarctique, chacun de ses voyages a produit la même fascination. Son amour des animaux l’a toujours habité, au point qu’il leur a consacré sa vie entière. Dès l’âge de douze ans, il fonde le club des Jeunes Amis des Animaux (JAA) avec Jean-Paul Steiger. Il se passionne notamment pour les reptiles et les rapaces, espèces trop peu connues et mal jugées. Après ses études, il donne des conférences dans les écoles, et parcourt la France pour présenter une exposition itinérante, le Pavillon de la nature. Par la suite, tous ses projets seront liés à son intérêt pour la biodiversité. Il évoque son « privilège d’avoir parcouru la planète et rencontré ses habitants, hommes et animaux ».  

 

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Alain Bougrain Dubourg, journaliste et président de la Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO)

 

De l’émerveillement, il s’oriente ensuite vers l’engagement.  Car Allain Bougrain Dubourg n’est pas de ceux qui restent indifférents face à la cruauté. Bien au contraire, il souhaite agir et « faire passer un message ». Dès son plus jeune âge, il est convaincu que sa génération va sauver le monde animal. Et s’il affirme désormais que « le combat durera longtemps », il demeure convaincu que « nous aurions tort de désespérer », car bientôt « nous commencerons à nous comporter de manière éthique à l’égard de l’animal ». Ce combat, c’est notamment à la télévision qu’il le mène. De Terre des bêtes à Animalia, aux côtés de Dorothée ou de Michel Drucker, il rejoint les grandes figures représentatives de la défense de la biodiversité. Il devient journaliste « par un concours de circonstances » et acquière une grande notoriété. Cette profession va lui permettre de militer et de tout mettre en œuvre pour préserver l’environnement.

Lucide, il reconnait que le journalisme animalier n’a jamais suscité un engouement important. Malgré une actualité d’une grande richesse, les articles sur le sujet demeurent mélangés aux informations générales et il est rare que les médias consacrent une rubrique à la biodiversité. Néanmoins, il constate une évolution vers « une plus grande transversalité de l’information ». La radio et la télévision s’intéressent désormais plus à l’environnement que dans sa jeunesse et constituent un secteur professionnel attractif pour les futurs journalistes animaliers. Des journalistes qui, il en est sûr, peuvent avoir de l’influence et faire évoluer les mentalités s’ils respectent les règles journalistiques. Ne jamais négliger l’information pour s’en tenir à l’émotion, quand bien même ils choisissent de s’engager. Et surtout essayer de toujours « parler le langage de l’autre et de se mettre à sa place ».

 Mais cela ne suffit pas. Allain Bougrain Dubourg en est convaincu, « le meilleur moyen de toucher les gens, c’est de montrer des images ». Des images que tout le monde se doit de voir, y compris lui. Avec courage, il filme des scènes d’une terrible violence. Il se rend dans les abattoirs où soixante milliards d’êtres vivants sont saignés chaque année, au Canada où les bébés phoques se font massacrer. Il filme un centre de transit de la banlieue de Dakar pour dénoncer l’agonie des perroquets et assiste à de violentes scènes de capture de zèbres, dont le cri de désespoir résonne encore dans sa mémoire. Ces visions, il en fait des cauchemars, et face à certaines scènes de tortures et d’agonies, il a « le cœur en larmes ». Mais il veille « à ne rien laisser paraitre » pour pouvoir filmer et, par la suite, témoigner.

Ayant assisté à toutes ces scènes, il ne parvient que très difficilement à supporter l’indifférence et le mépris de ses interlocuteurs. S’il ressent parfois une peine profonde, c’est un sentiment de colère qui l’anime le plus souvent. Et lorsqu’il échoue, il se sent coupable, convaincu que les animaux paieront le prix, ô combien sanglant, de ses erreurs. Dans ces moments difficiles, c’est auprès des femmes de sa vie qu’il trouve du réconfort. Catherine Ceylac, Brigitte Bardot, Jeane Manson… Chacune d’elles partage sa passion et chacune d’elles l’encourage à poursuivre son combat. Et puis, il y a aussi ces inconnus qu’il rencontre et qui l’invitent à ne pas abandonner. Si bien que ces sentiments de douleur, de colère, de culpabilité, Allain Bougrain Dubourg parvient à les transformer en force. Ils lui permettent de ne jamais oublier  « que chaque seconde compte pour faire reculer la souffrance animale, car pendant que l’on tergiverse, les douleurs s’accumulent ».

Son métier de journaliste lui permet de rencontrer les responsables politiques. Il comprend alors que les animaux ne constituent pas une priorité et que l’un des problèmes majeurs de notre société réside dans notre perpétuelle  « hiérarchisation des souffrances ». Face à ce désolant constat, il choisit d’intervenir lui-même pour montrer que « chacun d’entre nous peut être acteur. Nous pouvons tous signer une pétition, participer à une manifestation, adhérer à une association ou simplement cesser de consommer un produit qui fragilise nos écosystèmes ». Et son combat, il le mène avec sincérité. Les honneurs, les compliments, les félicitations… Tout cela l’importe peu. La cause qu’il défend constitue son unique motivation. Cette cause pour laquelle il a tellement marché. Cette cause pour laquelle Il faut continuer de marcher.

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